En résumé : des tarifs de 25 % sur tout ce qui entre aux États-Unis et des tarifs équivalents sur des produits spécifiques en provenance des États-Unis ne sont plus du domaine du risque théorique—c’est une réelle éventualité. Il ne s’agit pas ici d’un simple discours politique destiné aux entreprises canadiennes qui expédient des marchandises de l’autre côté de la frontière. Il s’agit de vos coûts, de vos contrats et de vos résultats. Le bon moment pour réagir ? Hier !
Allons droit au but : les États-Unis passent à la vitesse supérieure en matière de commerce mondial. Ce n’est pas à prendre à la légère si votre entreprise canadienne transporte des marchandises de l’autre côté de la frontière. Il s’agit d’un changement qui pourrait affecter votre chaîne d’approvisionnement.
Les tarifs sont de retour et ils se multiplient
Vous souvenez-vous de l’époque où les tarifs étaient essentiellement un « problème chinois » ? Plus maintenant. Les États-Unis ne se contentent pas de réviser leurs politiques envers leurs rivaux traditionnels ; ils effectuent également des ajustements importants qui affecteront leurs partenaires de longue date, dont le Canada. On parle de tarifs de 25 % sur tout ce qui entre aux États-Unis et de tarifs supplémentaires de 25 % sur une liste de produits spécifiques importés de nos voisins américains. Le Canada y répond en imposant des tarifs de 25 % sur une liste de marchandises spécifiques importées des États-Unis.
Le raccourci permettant tout cela est la loi International Emergency Economic Powers Act (IEEPA). Celle-ci permet aux États-Unis d’imposer des tarifs au nom de la « sécurité nationale ». En d’autres termes, les décisions peuvent être prises rapidement, sans négociation préalable. Du jour au lendemain, vous pourriez apprendre par les réseaux sociaux que des tarifs seront désormais appliqués. Bienvenue en 2025, là où la réalité ressemble parfois à un univers parallèle.
Pourquoi s’en inquiéter ?
- Le Canada dépend grandement du commerce avec les États-Unis : les États-Unis sont le plus important partenaire commercial du Canada, et des milliards de dollars traversent la frontière tous les jours. Toute perturbation, telle que l’imposition soudaine de tarifs de 25 %, peut très rapidement avoir des répercussions sur l’ensemble de l’économie canadienne.
- Les coûts augmentent - et ils augmentent rapidement : lorsque des milliards de dollars sont échangés en franchise de droits, l’ajout de tarifs de 25 % fait croître ces chiffres rapidement. Il ne s’agit pas juste d’une modification mineure, mais plutôt d’un coût significatif qui affectera très rapidement vos résultats financiers.
- L’ACEUM fait l’objet d’un réexamen : cet accord commercial est en cours de révision, et certains avantages pourraient être en péril. Techniquement, il sera ouvert à la révision l’année prochaine. Nous avons considéré le libre-échange avec notre partenaire le plus proche comme acquis, mais cela pourrait bien changer. Au-delà des problèmes bien connus tels que ceux de l’industrie laitière du Canada, des modifications plus étendues pourraient avoir des répercussions sur des industries clés.
- Le temps presse : nous devons examiner notre chaîne d’approvisionnement et ce, rapidement. Retarder les ajustements nécessaires pourrait rendre votre entreprise vulnérable face à des changements soudains dans les tarifs, les réglementations et les coûts.
Il ne s’agit pas ici d’un incident isolé, mais plutôt d’une tendance généralisée. Ne prenez pas le risque de croire que cela ne se reproduira pas !
Il ne s’agit plus juste des tarifs
- Les barrières non tarifaires : les États-Unis sont en train de renforcer les clauses Buy American (Achetez américain), ce qui pourrait limiter l’accès des Canadiens aux contrats gouvernementaux américains.
- Le contrôle des capitaux et les restrictions à l’exportation : si vous avez des partenaires américains, attendez-vous à des réglementations plus strictes.
- Les sanctions : selon le président Trump, des mesures économiques américaines pourraient frapper le Canada même si ce dernier s’aligne sur les intérêts américains. Si vous exportez vers les États-Unis, cela pourrait avoir les conséquences suivantes :
- De possibles retards à la frontière : de nombreuses expéditions pourraient soudainement passer au statut de contre-remboursement, et les courtiers pourraient exiger des paiements avant l’octroi de la mainlevée afin de limiter leurs risques financiers.
- Les ajustements de paiement : la participation aux systèmes de paiement ACH (Automated Clearing House) peut contribuer à rationaliser les transactions et à réduire les retards.
- L’impact sur les cautions : si les tarifs sont appliqués, le montant actuel de votre caution pourrait ne plus être suffisant. Vous devez augmenter le montant de la caution auprès de votre compagnie d’assurance pour couvrir les droits et taxes plus élevés.
- Les pratiques d’estimation de la valeur sous surveillance : les exportateurs vers les États-Unis pourraient être tentés de baisser la valeur déclarée de leurs marchandises pour réduire les coûts des tarifs, mais ce n’est pas recommandé. Les autorités peuvent facilement détecter les incohérences en analysant l’historique de vos expéditions. Baisser les prix pour éviter les taxes est considéré comme une fraude. Le jeu n’en vaut pas la chandelle.
En revanche, certains transporteurs pourraient être agréablement surpris en se rendant compte qu’ils ont surévalué leurs expéditions. L’estimation de la valeur étant moins cruciale sous le libre-échange, il n’y avait guère d’incitation à l’optimisation. Il est maintenant temps de voir si vous pouvez légalement baisser la valeur déclarée de vos marchandises et de vous ajuster en conséquence.
- Réévaluez les stratégies logistiques et douanières : certaines entreprises pourraient avoir avantage à maintenir des stocks aux États-Unis et à vendre directement à partir de ce pays. Cette approche peut permettre aux entreprises de déplacer les marchandises de l’autre côté de la frontière à un tarif de transfert ou par le biais de transactions intercompagnies, ce qui pourrait réduire l’impact direct des tarifs sur chaque expédition.
Les actions clés pour les exportateurs
- Analysez votre risque : évaluez la vulnérabilité de votre entreprise face aux tarifs américains. Calculez le total de la surtaxe projetée pour vos exportations vers les États-Unis. Êtes-vous toujours compétitif ? C’est le moment de réajuster vos modèles tarifaires.
- Parlez à vos clients : entamez des discussions avec vos partenaires américains sur un ajustement éventuel des coûts, les impacts sur la chaîne d’approvisionnement et l’élaboration conjointe de stratégies d’atténuation des risques.
- Vérifiez vos contrats : veillez à ce que les conditions de paiement et les responsabilités en matière de tarifs soient clairement définies avec vos partenaires américains. Et assurez-vous de respecter le contrat. Si l’accord stipule que le client est responsable des douanes, mais que votre service d’expédition continue à fonctionner selon les conditions de livraison DDP (rendu sur les droits acquittés), arrêtez tout et modifiez-le dès maintenant. Personne n’y prêtait attention sous le libre-échange, mais cette négligence pourrait s’avérer très coûteuse dans la situation actuelle.
- Soyez proactif : préparez-vous comme si les tarifs allaient revenir à tout moment. S’ils ne le font pas, vous aurez une longueur d’avance.
Si vous importez des États-Unis
L’imposition de tarifs de 25 % sur certains produits en provenance des États-Unis signifie que la structure des coûts de nombreuses entreprises sera modifiée de manière significative. Des produits dont vous dépendez pourraient devenir beaucoup plus dispendieux, ce qui aura un impact sur vos marges et vos stratégies de tarification.
Les actions clés pour les importateurs
- Identifiez les produits touchés : vérifiez quels articles visés par les tarifs auront des répercussions directes sur votre entreprise. La première liste de codes SH est publiée ici.
- Diversifiez les fournisseurs : réduisez votre dépendance envers les fournisseurs américains en explorant des sources alternatives au Canada ou dans d’autres pays. La fierté nationale pourrait être un atout, les consommateurs canadiens considérant plus favorablement les produits provenant de pays autres que les États-Unis. Par ailleurs, une surtaxe de 25 % est tellement élevée que les fournisseurs alternatifs - même plus éloignés - pourraient devenir compétitifs, même compte tenu des frais de transport.
- Examinez les structures de coûts : ajustez votre stratégie de tarification pour faire face à l’augmentation des coûts.
- Vérifiez les processus logistiques et douaniers : certaines entreprises pourraient devoir effectuer des remboursements de droits et taxes lors de la réexportation de produits - des procédures qu’elles n’avaient jamais dû prendre en considération auparavant. Ce changement implique un nouveau degré de traçabilité et d’obligation de déclaration, et affecte la gestion des flux de trésorerie. Pour garder une longueur d’avance, il faut réévaluer ces processus dès maintenant afin d’éviter des surprises qui pourront s’avérer coûteuses.
Que devriez-vous faire ?
- Ne prenez pas les tarifs à la légère : même si vous pensez que les tarifs ne seront pas appliqués, faites comme si c’était le cas. N’attendez pas la confirmation et préparez-vous dès maintenant.
- Auditez vos chaînes d’approvisionnement : identifiez les points faibles de la logistique, des douanes et de l’ensemble des opérations.
- Envisagez des changements proactifs : mettez en place des stratégies que vous utiliseriez si les tarifs étaient déjà en application, lorsque cela fait sens. Ceci vous protégera de changements soudains et permettra à votre entreprise de s’ajuster rapidement.
- Diversifiez : réduisez votre dépendance envers un seul pays ou une route commerciale unique.
- Restez informés : les réglementations évoluent rapidement. Restez à l’affût.
- Consultez des experts en commerce : prenez conseil auprès de professionnels qui comprennent les politiques américaines et les douanes canadiennes.
- Partagez cet article : vous connaissez peut-être quelqu’un à qui il pourrait être utile, qu’il s’agisse d’un collègue, d’un client ou d’un partenaire. Rester informé est essentiel pour garder une longueur d’avance.
Et pour conclure… Les États-Unis redéfinissent leur rôle
Les États-Unis ne jouent désormais plus le rôle de stabilisateur du commerce mondial. Ils se concentrent maintenant sur leurs propres priorités. Il ne s’agit pas seulement d’un défi pour les entreprises canadiennes, mais également d’une opportunité de revoir les stratégies, de développer la résilience et de s’adapter à un paysage mondial en pleine évolution.
Si vous ne réagissez pas, il sera déjà trop tard.